Mathilde Papapietro (c) '99
Mathilde Papapietro

On trouvait dans l’oeuvre de Mathilde Papapietro, plus que l’inscription d’un signe dans l’espace, la reconnaissance, le captage du signe préexistant et sa mise en évidence. Les brins d’herbe greffés les uns aux autres, idéogrammes, en étaient l’illustration; formes ouvertes, calligraphiques, élégantes, isolées ou accrochées en constellation.
Le mur uniforme, page vierge, devient inaccessible. Pour retrouver l’espace blanc, il faut franchir le réseau constitué par le ruban adhésif et les aiguilles de pins.
L’essentiel réside peut-être dans cet infime écart maintenu entre la paroi et les bandes d’adhésif. Celles-ci sont en tension et embrassent l’étendue du mur de manière à en saisir l’envergure. Elles annulent dans le même temps l’effet visuel premier de page d’écriture ou de portée musicale puisqu’elles ne renforcent pas la bidimentionnalité du support mais au contraire jouent l’espace de façon tenue. Cet intervalle suffit à créer une profondeur qui renvoie la matière à son image et maintient dans le domaine du réel ce qui, collé au mur, serait devenu un signe.
Le passage de la maquette à l’oeuvre in situ en témoigne.
Dans la maquette, les aiguilles de pins prennent valeur et fonction de lignes grâce au rôle unificateur du fond. Le résultat obtenu est une image. L’oeuvre dans le lieu, affirme sa présence réelle du simple fait de la possible projection de l’ombre sur la paroi.Les forces sont mobilisées pour tenter d’organiser un désordre (alignement), pour stabiliser ce qui est mouvant et fluide (fixation), tout en maintenant une certaine forme de précarité. Les bandes, à peine soutenues, restent en suspension, dans l’espace, individualisées et autonomes.
Les oppositions sont fortes entre les horizontales transparentes et les courbes diagonales aux orientations multiples des aiguilles de pins, entre la répétition régulière et les écartement sensiblement proches des premières et la répartition aléatoire des secondes. Ce n’est pas le mouvement réel qui produit l’effet dynamique mais le rythme généré par le nombre, la position, la densité des brindilles et leur inscription dans un parcours linéaire.
Tout est en nuance.
Le point d’accroche de l’aiguille de pin sur le ruban est comme l’instant fixé qui soudain fige la trajectoire.
Au-delà et en deçà le mouvement se poursuit.
Autant d’instants qui scandent et interrompent le parcours horizontal... La vie n’est pas un long fleuve tranquille.

Claire Viallat

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